L'envoyée

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Lorsqu’il s’était senti glisser sur la boue, il n’avait pas essayé de se retenir au canot, craignant d’entraîner Abigail avec lui dans sa chute. L’eau froide le submergea, et il crut que son cœur allait s’arrêter de battre. L’onde était glaciale et lui étreignait la poitrine. Bien vite, le courant le poussa hors de portée de voix, et il aperçût Abigail qui sortait de sous le canot, au moment même où la grande main de la rivière lui remettait la tête sous son voile. Il ne refit surface que plusieurs instants plus tard, reprenant son souffle juste avant d’être submergé à nouveau. L’onde joua ainsi avec lui sur une longue distance. Puis un tronc d’arbre s’approcha de lui, et il s’y accrocha, bénissant la Déesse qui l’avait mis sur son chemin. Il glissa sur une portion plus calme de la rivière, mais le courant restait toujours aussi fort. Les arbres défilaient rapidement de chaque côté de lui, trop rapidement pour qu’il puisse même tenter de nager vers l’une des deux rives. Soudain, il lui sembla sentir de la fumée.  Puis il vit une flamme au loin, comme la brume se levait. Il leva la main et cria de toutes les faibles forces qu’il lui restait. Des hommes, des hommes sur la rive! Il cria encore. Les hommes couraient parallèlement à lui. Ils lui hurlaient quelque chose. Que disaient-ils? Il ne faisait même plus froid. Il était simplement fatigué. S’il pouvait seulement dormir un peu, la tête appuyée sur le tronc d’arbre. Comme il atteignait un coude dans la rivière, il se rapprocha de la rive. Deux hommes couraient vers lui. L’un deux s’engagea dans l’eau jusqu’à la taille. Il attrapa Cyprien comme celui-ci glissait sous l’eau.